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Maladie de Hashimoto : l'approche fonctionnelle pour reprendre le contrôle de votre thyroïde

  • Photo du rédacteur: Dr Nicolas Dedieu
    Dr Nicolas Dedieu
  • il y a 6 jours
  • 8 min de lecture


La thyroïdite de Hashimoto n'est pas simplement une cause d'hypothyroïdie ; c'est un signal complexe que votre système immunitaire envoie. Touchant plus de 3 % de la population mondiale, elle est la maladie auto-immune la plus fréquente et la principale cause d'hypothyroïdie dans les pays industrialisés. Les symptômes – fatigue chronique, prise de poids inexpliquée, frilosité, brouillard mental, douleurs musculaires – peuvent considérablement altérer la qualité de vie. Pourtant, trop souvent, l'approche se limite à traiter la conséquence (la baisse des hormones thyroïdiennes) sans explorer la cause profonde : pourquoi le corps s'attaque-t-il à lui-même ?


Dans cet article, je vous propose d'explorer la maladie de Hashimoto sous l'angle de la médecine fonctionnelle. Loin de rejeter l'approche conventionnelle, cette vision cherche à la compléter en identifiant et en corrigeant les déséquilibres fondamentaux qui déclenchent et perpétuent la cascade auto-immune. C'est une invitation à devenir un acteur éclairé de votre santé, en comprenant les mécanismes en jeu pour mieux agir sur eux.



Comprendre la maladie de Hashimoto : au-delà de la TSH


Avant d'explorer les solutions, il est crucial de comprendre ce qui se passe dans le corps. La thyroïdite de Hashimoto est une maladie auto-immu

ne chronique où le système immunitaire produit des anticorps qui ciblent et détruisent progressivement la glande thyroïde.



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Le diagnostic conventionnel : les marqueurs clés


Le diagnostic repose sur des analyses sanguines qui révèlent :


  1. Des niveaux d'anticorps élevés : Les deux principaux sont les anticorps anti-thyroperoxydase (anti-TPO), dirigés contre une enzyme clé de la production hormonale, et les anticorps anti-thyroglobuline (anti-Tg), ciblant la protéine de stockage des hormones. Leur présence confirme l'attaque auto-immune, souvent des années avant que la fonction thyroïdienne ne soit affectée.


  1. Des variations de la TSH et des hormones thyroïdiennes :

Au début, la TSH (l'hormone qui stimule la thyroïde) et la T4 (l'hormone de réserve) peuvent être normales.

Avec le temps, la destruction glandulaire s'installe. La thyroïde peine à produire ses hormones, le taux de T4 libre baisse, et l'hypophyse compense en augmentant la TSH. On parle alors d'hypothyroïdie "avérée".


Le traitement standard : la lévothyroxine, une réponse nécessaire mais partielle


Le traitement conventionnel est simple et efficace : remplacer l'hormone que la thyroïde ne produit plus. La lévothyroxine (une forme synthétique de T4) est le traitement de référence. Elle permet de normaliser le taux de TSH et de soulager de nombreux symptômes de l'hypothyroïdie.

Cependant, cette approche présente une limite majeure : elle ne freine pas le processus auto-immun sous-jacent. Les anticorps peuvent rester élevés, l'inflammation persiste, et de nombreux patients, bien que leur TSH soit "dans la norme", continuent de souffrir de symptômes invalidants. C'est ici que l'approche fonctionnelle entre en scène.



L'approche fonctionnelle : à la recherche des causes profondes


La médecine fonctionnelle pose une question fondamentale : "Pourquoi le système immunitaire est-il devenu confus ?". Elle s'intéresse aux interactions entre la génétique, l'environnement et le mode de vie. Pour Hashimoto, l'enquête se concentre sur cinq piliers interconnectés.



1. L'axe intestin-thyroïde : quand tout commence dans le ventre


L'idée qu'une maladie de la thyroïde puisse trouver son origine dans l'intestin est l'un des piliers de l'approche fonctionnelle. Environ 70 à 80 % de notre système immunitaire réside dans notre intestin. Un déséquilibre à ce niveau peut avoir des répercussions systémiques.


La perméabilité intestinale ou "leaky gut"


Imaginez la paroi de votre intestin comme une fine muraille protégée par des gardes vigilants. Normalement, seuls les nutriments bien digérés sont autorisés à passer. En cas de perméabilité intestinale, cette muraille se fissure. Des particules alimentaires mal digérées, des toxines et des fragments bactériens la traversent et se retrouvent dans la circulation sanguine.

Le système immunitaire, ne reconnaissant pas ces "envahisseurs", sonne l'alarme et déclenche une réponse inflammatoire. Des études ont montré que les patients atteints de Hashimoto présentent des niveaux élevés de zonuline, une protéine qui régule les "portes" de la barrière intestinale, confirmant une perméabilité accrue.


Le microbiote et la dysbiose


Le déséquilibre du microbiote, ou dysbiose, est un autre facteur clé. Une flore intestinale saine éduque et régule notre système immunitaire. Des recherches ont identifié des profils de microbiote spécifiques chez les patients Hashimoto, avec une diminution de bactéries bénéfiques (comme les Bifidobacterium) et une augmentation de bactéries pro-inflammatoires. La présence d'une prolifération bactérienne dans l'intestin grêle (SIBO) est également fréquemment associée à Hashimoto.



2. Inflammation, immunité et alimentation : le rôle central du gluten


Si l'intestin est le théâtre de la bataille, l'alimentation fournit souvent les munitions. Certains aliments peuvent déclencher ou entretenir l'inflammation et la confusion immunitaire.


Le gluten et la mimétisme moléculaire


Pour les personnes génétiquement prédisposées, le gluten est souvent l'ennemi public numéro un. Le mécanisme principal est le mimétisme moléculaire. La structure moléculaire de la gliadine (une protéine du gluten) ressemble étrangement à celle de la thyroperoxydase (TPO).

Lorsqu'une personne sensible consomme du gluten, le système immunitaire produit des anticorps pour attaquer la gliadine. Mais en raison de cette ressemblance, ces anticorps peuvent se tromper de cible et attaquer également la glande thyroïde. De plus, le gluten est un déclencheur connu d'une production accrue de zonuline, favorisant la perméabilité intestinale.

De nombreuses études ont démontré qu'un régime sans gluten strict peut entraîner une réduction significative des anticorps anti-TPO et anti-Tg, apaisant ainsi l'attaque auto-immune.


Les produits laitiers et autres sensibilités


D'autres sensibilités alimentaires, notamment aux protéines de lait de vache (caséine) ou au soja, peuvent entretenir l'inflammation chez certaines personnes. Une approche d'élimination suivie d'une réintroduction peut aider à identifier les déclencheurs personnels.



3. L'axe stress-surrénales-thyroïde : quand le cortisol s'en mêle


Le stress chronique est un puissant perturbateur hormonal. Le corps gère le stress via l'axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien (HPA), qui culmine avec la libération de cortisol. Un excès de cortisol perturbe directement la fonction thyroïdienne de plusieurs manières :

  • Il freine la conversion de T4 en T3 : La T4 est l'hormone de réserve. Elle doit être convertie en T3, la forme active, pour être utilisée par les cellules. Le cortisol inhibe l'enzyme responsable de cette conversion, ce qui peut entraîner des symptômes d'hypothyroïdie même avec un taux de T4 normal.

  • Il peut supprimer la TSH : Un stress intense peut faire baisser la TSH, masquant une hypothyroïdie sous-jacente.

  • Il favorise l'inflammation et la perméabilité intestinale, créant un cercle vicieux.

La gestion du stress n'est donc pas un luxe, mais une nécessité thérapeutique. Des pratiques comme la méditation, le yoga, la cohérence cardiaque ou simplement des activités relaxantes sont essentielles pour réguler l'axe HPA et soutenir la thyroïde.



4. Les carences nutritionnelles : les matériaux manquants


La production d'hormones thyroïdiennes et la régulation immunitaire sont des processus biochimiques exigeants, qui requièrent des vitamines et minéraux spécifiques. Les carences sont extrêmement fréquentes chez les patients Hashimoto.

  • Sélénium : C'est un cofacteur essentiel des enzymes qui protègent la thyroïde du stress oxydatif généré lors de la production d'hormones. De multiples études ont montré qu'une supplémentation en sélénium (environ 200 µg/jour) peut réduire significativement les anticorps anti-TPO.

  • Fer : L'enzyme TPO est dépendante du fer. Une carence en fer (très fréquente chez les femmes) peut donc mimer ou aggraver une hypothyroïdie.

  • Zinc : Essentiel à la synthèse des hormones thyroïdiennes et à la régulation immunitaire, le zinc est souvent déficient chez les personnes atteintes de maladies auto-immunes.

  • Vitamine D : Véritable hormone, la vitamine D est un puissant modulateur du système immunitaire. Des niveaux bas sont associés à un risque accru de développer Hashimoto et à des niveaux d'anticorps plus élevés.

  • Vitamine B12 : Une carence est souvent observée, fréquemment liée à une autre maladie auto-immune qui attaque l'estomac (gastrite atrophique ou anémie de Biermer), empêchant l'absorption de la B12.

  • Le paradoxe de l'iode : L'iode est indispensable à la fabrication des hormones thyroïdiennes. Cependant, chez les personnes prédisposées à Hashimoto, un excès d'iode (souvent via des compléments à base d'algues comme le kelp) peut agir comme un détonateur, rendant la thyroglobuline plus "immunogène" et déclenchant ou aggravant l'attaque auto-immune. La prudence est donc de mise.



5. Les toxines environnementales : les saboteurs silencieux


Nous vivons dans un environnement où nous sommes exposés à de nombreux produits chimiques. Certains, appelés perturbateurs endocriniens, peuvent interférer avec le système hormonal.

Des composés comme le Bisphénol A (BPA), que l'on trouve dans certains plastiques et tickets de caisse, et les phtalates, présents dans les cosmétiques et les emballages, sont particulièrement préoccupants. Des études suggèrent qu'ils peuvent se lier aux récepteurs des hormones thyroïdiennes, perturber leur synthèse et leur transport, et potentiellement favoriser une réponse auto-immune. Les métaux lourds (mercure, plomb, cadmium) sont également des toxines thyroïdiennes connues.

Limiter son exposition en choisissant des contenants en verre, des cosmétiques naturels et des aliments bio est une démarche préventive pertinente.



Mise en pratique : conseils pour gérer Hashimoto au quotidien


  1. Adoptez une alimentation anti-inflammatoire : Envisagez une éviction stricte du gluten pendant au moins 3 à 6 mois pour évaluer son impact sur vos symptômes et vos anticorps. Privilégiez les légumes, les fruits, les protéines de qualité et les bonnes graisses (oméga 3).

  2. Soignez votre intestin : Intégrez des aliments riches en probiotiques (kéfir, kombucha, légumes fermentés) et en prébiotiques (poireaux, asperges, oignons) pour nourrir votre microbiote. Le bouillon d'os peut aider à réparer la muqueuse intestinale.

  3. Faites de la gestion du stress une priorité : Intégrez 10 à 15 minutes de pratique relaxante chaque jour : méditation, respiration profonde, yoga, ou une simple marche dans la nature.

  4. Optimisez vos nutriments : Demandez à votre médecin de tester vos niveaux de vitamine D, de fer (ferritine), et de vitamine B12. Consommez des aliments riches en sélénium (noix du Brésil, 2 par jour suffisent) et en zinc (graines de courge, fruits de mer).

  5. Réduisez votre charge toxique : Filtrez votre eau, aérez votre logement, utilisez des produits ménagers et cosmétiques naturels, et évitez de chauffer des aliments dans des contenants en plastique.



Conclusion : redevenez le chef d'orchestre de votre santé


La maladie de Hashimoto est bien plus qu'une simple déficience hormonale. C'est une condition complexe et multifactorielle qui invite à une exploration plus profonde de votre corps et de votre mode de vie.


En intégrant les stratégies de l'approche fonctionnelle – soutien intestinal, ajustements nutritionnels, gestion du stress et correction des carences –, il est possible non seulement de mieux gérer les symptômes, mais aussi d'agir sur les racines mêmes de la maladie. Ce parcours, bien qu'exigeant, est responsabilisant. Il vous permet de passer d'un statut de patient passif à celui d'acteur éclairé de votre santé, et d'aborder votre condition de manière plus apaisée et durable.


Si vous souhaitez explorer une approche personnalisée pour votre santé thyroïdienne, rapprochez-vous d'un professionnel de santé formé en médecine fonctionnelle. Une prise en charge intégrative peut ouvrir de nouvelles perspectives pour une vie pleine et entière, même avec Hashimoto.



Avertissement


Les informations fournies dans cet article sont destinées à des fins éducatives uniquement et ne remplacent en aucun cas un avis médical professionnel. Consultez toujours votre médecin ou un autre professionnel de santé qualifié pour toute question concernant une condition médicale.


Références scientifiques


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  7. Rôle du Zinc : Severo, J. S., Morais, J., de Freitas, T. E. C., et al. (2019). The Role of Zinc in Thyroid Hormones Metabolism. International Journal for Vitamin and Nutrition Research.

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  8. Carence en Vitamine B12 : Ness-Abramof, R., et al. (2006). Prevalence and evaluation of B12 deficiency in patients with autoimmune thyroid disease. The American Journal of the Medical Sciences.

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  9. Perturbateurs endocriniens : Perturbateurs endocriniens. (2023). INSERM.

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  11. Axe HPA (Stress) : How the HPA Axis Affects Hashimoto's and Hypothyroidism. (2023). Paloma Health.

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  12. Rôle de l'iode : Goitre Simple Non Toxique. (2023). Manuels MSD, Version pour professionnels.

    URL : https://www.msdmanuals.com/fr/professional/troubles-endocriniens-et-m%C3%A9taboliques/troubles-thyro%C3%AFdiens/goitre-simple-non-toxique


 
 
 

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