Ballonnements : non, ils ne sont pas « normaux » - comprendre et agir selon la médecine fonctionnelle
- Dr Nicolas Dedieu

- 20 oct.
- 4 min de lecture
Vous finissez de dîner… et une heure plus tard, votre ventre ressemble à un ballon de baudruche ?
Vous déboutonnez discrètement votre pantalon, espérant que la gêne s’estompe ?
Si cette situation est devenue votre quotidien, cet article est pour vous.
Car non, les ballonnements chroniques ne sont pas une fatalité, ni une simple "mauvaise digestion". Ils traduisent un déséquilibre réel du système digestif — et la médecine fonctionnelle nous aide à en comprendre les causes profondes.

Pourquoi les ballonnements ne sont pas « normaux »
Les ballonnements relèvent souvent d’un trouble digestif fonctionnel : un dysfonctionnement du tube digestif sans lésion visible à l’imagerie ou à l’endoscopie.
En médecine fonctionnelle, “fonctionnel” ne signifie pas “imaginaire” : cela reflète un déséquilibre réel de la physiologie digestive.
Ce déséquilibre peut concerner la digestion enzymatique, le microbiote intestinal, le système nerveux entérique ou encore la régulation hormonale.L’enjeu n’est donc pas de masquer le symptôme, mais de retrouver l’équilibre des fonctions digestives.
Mon ventre gonfle : et si c’était mon estomac… ou ma bile ?
1. Hypochlorhydrie : une acidité gastrique insuffisante
Une acidité trop faible empêche la bonne dégradation des protéines et la stérilisation naturelle des aliments. Résultat : fermentations précoces, lourdeurs et proliférations bactériennes dans l’intestin grêle (SIBO).Les causes ? Le stress chronique, les inhibiteurs de la pompe à protons (IPP) ou le vieillissement.
2. Déficits enzymatiques
Un manque d’enzymes digestives (amylase, lactase, lipase…) provoque une digestion incomplète, laissant des résidus qui fermentent dans le grêle.Le déficit en lactase, par exemple, est responsable de nombreux troubles liés aux produits laitiers.
3. Insuffisance biliaire
Une bile trop peu sécrétée perturbe la digestion des graisses et ralentit le transit.Les signes typiques : nausées, lourdeurs postprandiales, selles claires ou grasses.
4. Dysbiose intestinale
Le microbiote intestinal, composé de 100 000 milliards de micro-organismes, influence la digestion, l’immunité et même l’humeur.Quand certaines bactéries deviennent dominantes, c’est la dysbiose : ballonnements, gaz, inflammation et fatigue sont souvent au rendez-vous.
5. SIBO : prolifération bactérienne dans le grêle
Dans le SIBO, des bactéries normalement cantonnées au côlon migrent dans le grêle, où elles fermentent les sucres ingérés.Les symptômes typiques : ventre gonflé dès la fin du repas, ballonnements douloureux, éructations, alternance diarrhée/constipation.Le diagnostic repose sur un test respiratoire à l’hydrogène et au méthane.
6. Candidose et parasitoses digestives
Une candidose intestinale (souvent après antibiothérapie, stress ou excès de sucre) ou une parasitose (Giardia, Blastocystis) peuvent provoquer des troubles similaires : gaz, crampes, inconfort, fatigue chronique.
Alimentation : quand vos repas nourrissent vos ballonnements
L’alimentation moderne, ultra-transformée et souvent avalée trop vite, est l’un des premiers responsables.
Principaux facteurs :
Intolérances (lactose, gluten, FODMAPs)
Excès de sucres et édulcorants (fructose, sorbitol, maltitol)
Manque d’aliments vivants riches en enzymes
Alcool, caféine, chewing-gum, boissons gazeuses
Repas pris dans le stress ou sans mastication
Observer votre alimentation pendant 7 jours est souvent plus révélateur qu’un médicament.Notez vos repas, vos symptômes, vos émotions : les corrélations sautent souvent aux yeux.
Le stress, cet ennemi invisible de votre digestion
Le tube digestif possède son propre réseau nerveux, le système nerveux entérique, en lien constant avec le cerveau via le nerf vague.En période de stress, le système sympathique (réaction “combat ou fuite”) prend le dessus, inhibant la digestion.Résultat : estomac contracté, bile moins fluide, transit ralenti, microbiote perturbé.
Le stress chronique est souvent le “maillon manquant” entre digestion normale et digestion douloureuse.
Le manque de sommeil, une respiration thoracique haute ou un diaphragme tendu aggravent encore cette inhibition du système parasympathique.D’où l’intérêt de rééduquer le nerf vague par la respiration abdominale, la cohérence cardiaque ou le chant, étonnamment efficace.
Et si vos hormones entraient dans la danse ?
Les variations hormonales influencent directement la digestion et la rétention d’eau.Chez la femme, le syndrome prémenstruel (variations œstrogènes/progestérone) peut ralentir le transit et majorer les ballonnements.L’hypothyroïdie débutante, même légère, réduit la motricité intestinale.
Un simple dosage de la TSH et de la T4 libre peut révéler une cause insoupçonnée de ballonnements persistants.
Les solutions fonctionnelles : rétablir l’équilibre
1. Rééquilibrer l’alimentation
Privilégiez les aliments bruts, cuits doucement et digestes : légumes cuits, bouillons, céréales trempées, viande blanche, plats mijotés.Hydratez-vous entre les repas, et non pendant.Les fruits sont mieux tolérés en dehors des repas.
2. Ralentir et mastiquer
Une bonne digestion commence dans la bouche.Prenez le temps de mâcher : 15 à 20 fois chaque bouchée. Cela stimule la salivation et prépare le travail enzymatique.
3. Soutenir la digestion
Selon le bilan fonctionnel, on peut envisager :
des enzymes digestives pour compenser les déficits,
de la bétaïne HCl en cas d’hypochlorhydrie,
des plantes cholagogues (artichaut, romarin, boldo) pour relancer la bile,
ou des probiotiques ciblés, choisis selon le profil du microbiote.
4. Réduire le stress et stimuler le nerf vague
Respiration abdominale lente (5 minutes, 3 fois par jour), cohérence cardiaque, yoga, méditation, marche consciente.Le chant ou les bains sonores stimulent naturellement le nerf vague.
5. Bouger chaque jour
La marche, la natation ou le renforcement doux activent le transit et soutiennent la fonction digestive.Une sangle abdominale tonique favorise une meilleure circulation et limite la distension.
Quand consulter ?
Si les ballonnements persistent plus de trois semaines malgré ces ajustements, il est essentiel de consulter un professionnel de santé formé en médecine fonctionnelle.
Un bilan personnalisé (analyse du microbiote, test respiratoire, marqueurs d’inflammation ou hormonaux) permet de cibler la cause et de proposer un protocole sur mesure.
Les ballonnements ne sont pas un simple désagrément. Ils sont souvent la première alerte d’un déséquilibre digestif plus profond.
En médecine fonctionnelle, l’objectif n’est pas seulement de calmer les gaz ou les crampes, mais de comprendre les interactions entre digestion, microbiote, stress et hormones.
C’est en corrigeant ces causes systémiques que l’on retrouve une digestion apaisée - et un ventre serein.
En résumé
Les ballonnements ne sont ni anodins, ni une fatalité.Ils traduisent un déséquilibre fonctionnel souvent réversible, à condition d’en identifier les causes réelles.
En agissant sur la digestion, le stress, l’alimentation et le microbiote, il est possible de retrouver confort, légèreté et vitalité digestive.
Docteur Nicolas Dedieu, PharmD
Médecine fonctionnelle et intégrative
Cet article est informatif et ne remplace pas une consultation médicale personnalisée.

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